À l’orée de la reprise des matchs européens, Arsenal s’apprête à nouveau à rencontrer un des épouvantails de la Champions League : le Bayern Munich. Aujourd’hui raillés pour leur manque de grinta, d’envie et de résultat sur la scène européenne, peu sont prêts à miser sur une victoire des gunners face à l’ogre allemand. Néanmoins, il serait dommage d’oublier qu’Arsenal, durant son épopée dorée, était une équipe crainte par toute l’Europe pour son jeu, son envie, tout ce qui semble lui faire défaut aujourd’hui. Rétrospective d’un match où les gunners montrèrent des ressources mentales hors norme lors du retour à San Siro contre l’Inter en 2003…
Arsenal se présente à San Siro la boule au ventre, et à raison. Les gunners comptent seulement 4 points dans leur groupe après 4 journées avec notamment une lourde défaite 3 à 0 face à l’Inter lors du match aller à Highbury. Arsenal doit vaincre ou mourir, tout autre résultat que la victoire sonnerait le glas de leur campagne européenne. Le commentateur anglais résume tout cela d’une réplique « Arsenal, please stand up, stand up ! ». D’entrée, la bataille du milieu de terrain tourne vite en faveur des gunners, les ouailles de Wenger sont agressifs sur le porteur du ballon et prennent la maîtrise du jeu. Du coté de l’Internazionale, les joueurs se déchargent bien vite du ballon et cherchent Vieri sur des balles longues ou Martins dans la profondeur, les intentions italiennes sont claires : attendre et piquer en contre en profitant du bloc haut des anglais. Il faut attendre la 6 ème minute pour voir les interistes sortir de leurs camps, Edu fait faute sur Lamouchi, mais le coup-franc ne donne rien. L’Inter n’effectue aucun pressing et reste dans son camps, ils attendent patiemment les gunners qui ont tout le loisir d’organiser le jeu. Le duo Parlour-Edu joue sans aucune pression et distillent à gauche, à droite, ou vers Kanu qui redescend très souvent au milieu pour participer au jeu. Néanmoins, les longues possessions d’Arsenal restent plutôt stériles, peu d’occasions et peu d’actions intéressantes comme en atteste cette tentative de une-deux entre Henry et Pirès à la 10 ème minute, heureusement les gunners récupèrent vite la balle mais perdent patience et finissent par abuser parfois du jeu long, or les trois défenseurs interistes sont tranquilles dans l’anticipation face au duo Henry-Kanu. Si Kanu décroche beaucoup pour jouer entre les lignes, Henry aime se déplacer sur les cotés pour étirer le bloc adverse comme en atteste une action à la 21 ème minute ou le légendaire numéro 14 d’Arsenal centre pour Kanu mais tout cela manque de précision technique. Sur les cotés, Ljungberg, et surtout Pirès repiquent dans l’axe et laissent les ailes à leurs latéraux, problème : si Cole monte très souvent et participe au jeu, c’est plus compliqué pour Touré à droite, l’absence de Lauren se ressent et cela déteint peu à peu sur Ljungberg. Il faut aussi noter que les manques de Viera au milieu et de Bergkamp à la création se font sentir, « The Non-flying Dutchman » n’avait pas son pareil pour créer, inventer, sa magie manque ce soir là à San Siro pour les gunners. Toutefois, la rencontre se débloque d’ailleurs par la gauche, Cole surprend la défense italienne en allant dans la surface, Pirès de la gauche passe à Henry au bord de la surface qui passe à Cole qui lui remet, Henry frappe, but, action d’école qui donne l’avantage aux gunners. Les mouvements de Pirès entre les lignes ont finies par payer, l’euphorie est de courte durée. Sur une perte de balle au milieu, Lamouchi récupère, transmet à Vieri qui frappe au but, la balle est contrée et rentre dans les filets, 1-1. Arsenal aurait pu enrager, invoquer la malchance, mais rien de tout cela, les gunners repartent à l’attaque et reprennent vite le contrôle du jeu. Néanmoins le problème reste le même et semble presque insoluble, comment passer le double rideau de l’Internazionale ? La rigueur défensive, c’est l’ADN même du football italien né de l’Église, et l’Inter semble appliquer son idée de jeu à merveille, c’est ainsi que le conflit s’enlise et les deux équipes rentrent au vestiaire sur un score d’égalité.
À San Siro, respecter ses idéaux
La seconde mi-temps commence à San Siro, Arsenal garde la même idée de jeu, insiste, mais l’Inter veille encore, mais que pour un temps. Henry comme souvent, arrive par la gauche, fixe son vis-à-vis et transmet la balle aux 6 mètres à … Ljungberg qui n’a plus qu’à la mettre au fond, 1-2. Les mouvements perpétuels d’Arsenal entre les lignes portent leurs fruits, les joueurs de l’Internazionale semblent avoir du mal à lire les grandes manœuvres anglaises, le rideau italien se brise suite à la répétition des mouvements entre les lignes des gunners, d’abord Cole, puis Ljungberg. La donne change avec ce but, l’Inter doit marquer, une défaite mettrait en danger leurs chances de qualification, le match s’emballe, le rythme par en vrille, c’est la transition entre une guerre de position et une bataille en mouvement. Lamouchi sort à la 56 ème minute et laisse sa place à Almeyda qui doit faire la transition plus rapidement entre la défense et l’attaque. Les interistes se jettent enfin dans la bataille, sont plus agressifs sur le porteur du ballon et gagnent plus souvent les duels et les seconds ballons, tout cela caractérisé par un petit temps fort italien avec deux corners, mais en vain, ils abusent encore et toujours de passes longues souvent mal senties, et Vieri ne peut pas toujours transformer le plomb en or. Le temps file à san siro et l’Inter ne parvient pas à revenir, pire, ils se découvrent avec un bloc plus haut, et donc plus friable, une faille dans laquelle Arsenal s’engouffre aisément à la fin du match quand les organismes sont fatigués. La partie s’emballe encore, 85 ème, Henry récupère la gonfle, remonte le ballon vers la gauche, rentre dans la surface, se joue de Javier Zanetti, excusez le du peu, et marque d’une frappe du gauche petit filet opposé, 1-3. La messe est dite mais les gunners ne s’arrêtent pas là, Henry à droite cette fois, effectue un contrôle parfait sur une passe longue, et balance un amour de passe à ras terre dans la surface qui passe à travers tout le monde sauf Kanu qui reprends et marque à son tour, 1-4. Pirès s’en va parachever l’œuvre londonienne et claque son doublé, 1-5.
Croire en ses chances, en son jeu
Personne ne voyait les gunners capables d’un tel match, d’un tel spectacle, et pourtant, ils l’ont fait, ils ont détruit une équipe qui leur avait fait si mal à Highbury, mais ces gunners là n’abandonnaient jamais, avaient une haine viscérale de la défaite qui semble bien loin aujourd’hui… Oui, l’époque n’est plus la même, Arsenal n’a plus le même visage, ne montre plus cette hargne, ce fighting spirit, mais juste avant d’affronter le Bayern, leur habituel bourreau en Champions League, il serait bon de se rappeler que l’équipe de Wenger n’a pas toujours été aussi peu impliquée sur le terrain, fragile mentalement et tactiquement (il faudrait un article long et détaillé de tout les maux d’Arsenal tactiquement tant ils sont nombreux). Dans des tas de clubs, les joueurs et les entraîneurs passent, mais l’ADN reste inchangé, alors pourquoi Arsenal semble avoir perdu tout ce qui a fait sa grandeur au début du nouveau millénaire ? L’équipe peut-elle avoir enfin une réaction d’orgueil ce soir dans la compétition reine ? Le titre en Premier League semble inaccessible aujourd’hui avec 10 points de retard sur le leader Chelsea, alors messieurs les gunners, faites nous rêver un peu en Europe, qu’importe l’adversaire, qu’importe le changement d’époque, qu’importe le changement d’effectif, retrouvez votre ADN déchu… Arsenal, please stand up, stand up !