Steve Clarke : Meneur d’homme

Appelé à la rescousse d’une sélection à la dérive, Steve Clarke a transformé une somme d’individualités en équipe solide. Présentation de l’homme qui a unifié l’Ecosse vers un but commun : l’Euro.

L’Angleterre pour fuir le sectarisme

Mais commençons par la base. Steve Clarke est un homme de deux clubs. D’abord, St Mirren où ses performances au poste de latéral droit tapèrent dans l’œil d’un club de Londres : Chelsea. De 87 à 98, l’Ecossais jouera 330 matchs avec les Blues, de quoi lui permettre une place dans le XI du centenaire du club élu en 2005. Pas mal non ?

Un départ pour Chelsea qui lui fera le plus grand bien, en tant que joueur, mais aussi en tant qu’humain. Au milieu des années 80, le sectarisme était très ancré en Écosse. Le fait d’avoir pu partir lui a apporté énormément :

« Je me réveille chaque matin en remerciant Chelsea de m’avoir extirpé de l’ouest de l’Ecosse, car mes enfants ne comprennent pas (Le sectarisme) » https://www.bbc.com/sport/football/47313458

Voilà ce que Clarke déclarait en 2019 après une défaite de Kilmarnock où des « supporters » des Rangers lui ont proféré des propos sectaires.

Il n’attendra qu’un an avant de retrouver une activité suite à sa retraite en tant que footballeur en 98. D’abord en tant qu’adjoint de Ruud Gullit à Newcastle, puis en tant que coach intérimaire le temps d’un match suite à la démission du technicien néerlandais.

Un poste d’adjoint qu’il continuera d’occuper pendant 8 ans au gré de 3 clubs différents, Chelsea (José Mourinho, Avram Grant : 04/08), West Ham (Gianfranco Zola : 08/11) et enfin Liverpool (Kenny Dalglish : 11/12).

C’est West Bromwich Albion qui lui donnera sa première expérience en tant que coach. Il emmènera les Baggies à la 8ᵉ place lors de la saison 2012/2013, le meilleur résultat du club. Malheureusement, la saison d’après, tout ne se passera pas comme prévu, à tel point qu’il sera mis à l’écart toute l’année 2014. Il quittera WBA pour rebondir à Reading en décembre. Une aventure d’un an qui se terminera par un limogeage.

Après un court passage à Aston Villa, il signera son retour en Écosse le 14 octobre 2017. Une signature dans son club de cœur : Kilmarnock. En deux saisons, Clarke transformera une équipe à deux doigts de couler en un prétendant au podium. Place que Killie obtiendra lors de la deuxième saison du technicien avec une 3ᵉ place. C’est d’ailleurs lors de cet excellent passage que les rumeurs les plus insistantes se sont créées. Celtic ? Rangers ? Un retour en Angleterre ? C’est finalement la sélection qui aura le dernier mot. Et comme tout est bien fait, il quittera Kilmarnock après la fin de la saison en laissant le club en Europe.

Steve Clarke : Le sauveur de la nation

“Je suis très heureux que nous ayons le manager de l’année pour mener l’équipe nationale d’Écosse, ainsi que son expérience sur les deux dernières décennies qui va être capitale pour une cure de jouvence à notre campagne de qualification pour l’Euro 2020, qui reprend le mois prochain. » https://www.scottishfa.co.uk/news/steve-clarke-appointed-scotland-national-team-head-coach/

Les mots d’Ian Maxwell, directeur général de la SFA (Scottish Football Association) soulignent l’importance de l’arrivée de Steve Clarke sur le banc de la sélection. Il faut dire que l’Écosse était tombée bien bas le 21 mars 2019. Une défaite cuisante au Kazakhstan 3-0 suivie d’une victoire peu convaincante à San Marino avait couté son poste à Alex McLeish. Une décision plutôt logique selon Robert Borthwick, analyste pour A View From The Terrace, show de la BBC Scotland :

« L’équipe n’avait aucune conviction. Il a eu un bon premier passage sur le banc de la sélection, mais c’était risqué de le faire revenir pour un second mandat et malheureusement ça ne l’a pas fait. La défaite au Kazakhstan est un des pires matchs de la sélection écossaise que j’ai jamais vue. »

À l’annonce de son départ, les fans étaient mitigés. S’il y avait le soulagement de voir partir McLeish, il y a tout de suite eu la peur de voir un mauvais choix de plus pour coacher la nation.

« Jusqu’à cette année, on a enchainé une génération entière d’échecs. Hormis peut-être Walter Smith, tous les coachs qui se sont succédé sur le banc de l’Ecosse depuis Craig Brown n’ont pas été au niveau. »

C’est donc Steve Clark qui fut choisi, lui qui était convoité par le Celtic notamment. Après avoir récolté le succès du côté de Kilmarnock, il semblait logique de le voir prendre la relève sur le banc de la sélection. Et il est intéressant de voir le chemin pris par Killie & l’Écosse.  Depuis le départ de Clarke, Kilmarnock s’est écroulé jusqu’à même être relégué cette saison, perdant le barrage de maintien contre le Dundee FC. À l’inverse, l’Écosse est montée en puissance jusqu’à obtenir le fameux sésame pour l’Euro 2021. À croire que tout ce que touche Steve Clarke se transforme en or.

Quelques matchs compliqués à ses débuts, logique quand on récupère un pays presque en ruine. Mais dès lors qu’il a trouvé son système tactique, l’Écosse s’est mise en marche. Neuf matchs de suite sans défaite avec comme évident point d’orgue la qualification à l’Euro. À partir du moment où les Écossais ont pris conscience de leurs qualités, les résultats ont suivi :

« John McGinn a récemment déclaré que l’Écosse comportait beaucoup de joueurs très talentueux et que Steve Clarke leur avait fait prendre conscience de ça. Il leur a inculqué le fait qu’ils avaient le niveau pour se qualifier dans de grandes compétitions. Il y a une super mentalité dans l’équipe. »

La mentalité, quelque chose qui manquait cruellement dans cette sélection qui ressemblait plus à un amas de joueurs sans âme, plus qu’à une vraie équipe tirant vers le même but. Steve Clarke a apporté ça et tout ceci, c’est tout de suite vu au fil des rencontres et des déclarations. Autre signe fort, les choix de Lyndon Dykes & Ché Adams de finalement représenter l’Écosse au plan international. Et même si l’on est en droit de se demander si Ché Adams aurait fait ce choix en cas de non-qualification de l’Écosse à l’Euro, le simple fait de le voir souriant dans un maillot bleu est communicatif.

Autre point important, peut-être même capital : la tactique. Durant les dernières années, l’Écosse s’est retrouvée face à un dilemme capital : comment faire cohabiter Andrew Robertson & Kieran Tierney ?

Les deux joueurs évoluent au même poste, latéral gauche, et il semblait impossible que les deux puissent s’épanouir en sélection au vu des matchs joués. C’est là où Steve Clarke intervient avec son 3-5-2/5-3-2. Un choix ayant levé plus d’un sourcil chez les fans, mais qui s’est avéré payant. Robertson en latéral gauche offensif, Tierney en central gauche d’une défense à trois et voilà comment l’Écosse peut enfin profiter des deux talents. Mais cela ne s’arrête pas là. Au-delà du simple dispositif, Steve Clarke a rapporté quelque chose qui avait fait son succès à Kilmarnock : la rigueur.

« [La différence entre Kilmarnock et l’Écosse] c’est qu’on retrouve différents systèmes, mais la même discipline et rigueur tactique. Chaque joueur sait parfaitement son rôle à n’importe quel moment et Clarke transmet ça individuellement de manière simple. Il sait comment faire comprendre aux joueurs la façon dont il souhaite faire jouer son équipe. Il a transposé ça de Kilmarnock à la sélection. »

Tant qu’on parle des joueurs et de l’adaptation tactique, il a su prendre des risques pour tirer le maximum des joueurs à sa disposition. Que ça soit le repositionnement de Scott McTominay en défense ou l’exploitation de John McGinn dans un rôle plus offensif, Steve Clarke fait en fonction de ce qu’il pense être le mieux et les résultats lui donnent raison. Cela ne se fait pas sans compromis. L’Écosse n’est pas la plus resplendissante des nations en termes de jeu, mais elle sait être efficace. Sa force, les contres. Avec la vitesse des latéraux et leur qualité de centre, les Écossais peuvent marquer sans crier gare. Et ça, les fans s’en accommodent très bien :

« Notre style de jeu n’est pas le plus attrayant, mais il est efficace. L’Écosse ne joue pas un football « sexy » et il peut même être ennuyeux par moment, mais c’est ce qui nous a permis de nous qualifier dans une grande compétition pour la première fois depuis 23 ans, donc on ne peut pas trop se plaindre. »

Une équipe n’est rien sans un grand leader et ça, l’Écosse l’a enfin. Steve Clarke va mener l’Alba à l’Euro, chose attendue par la Tartan Army depuis 25 ans. Maintenant, qu’attendre de cette équipe ? Continuer de viser le plus haut en s’inspirant pourquoi pas d’un voisin :

« L’objectif est de sortir des phases de poules, ce qui serait historique puisqu’on ne l’a jamais fait lors de nos dernières participations. On devrait s’inspirer du Pays de Galles. Une équipe moyenne avec quelques grands joueurs peut réaliser de grandes choses dans ce genre de compétitions et il n’y a aucune raison que l’Ecosse n’en fasse pas de même. »

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