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Dès son plus jeune âge, Fernando Torres portait sur ses épaules les espoirs d’un club et d’une ville entière. Icône précoce de l’Atlético Madrid, il s’est imposé comme un leader à un âge où d’autres commencent à peine à faire leurs preuves. De la ferveur des tribunes madrilènes à l’intensité des nuits européennes d’Anfield, en passant par les sacres internationaux avec l’Espagne, son parcours a été marqué par des sommets éclatants et des chutes abruptes. Retour sur l’ascension fulgurante et la trajectoire contrastée d’El Niño.
Né dans une famille passionnée par l’Atlético Madrid, Fernando Torres s’est rapidement fait un nom dans les équipes de jeunes. Son talent ne faisait aucun doute : à 11 ans, il décroche un essai chez les Colchoneros après avoir inscrit 55 buts en une saison avec Rayo 13. Très vite, il gravit les échelons et s’illustre sur la scène européenne en remportant la Nike Cup avec les moins de 15 ans, un tournoi qui le consacre comme l’un des talents les plus prometteurs de sa génération.
À seulement 17 ans, Torres fait ses débuts avec l’équipe première alors que l’Atlético évolue en deuxième division. Un an plus tard, il participe activement au retour du club parmi l’élite. Son impact est immédiat : il inscrit 13 buts lors de sa première saison en Liga et ne tarde pas à attirer l’attention des cadors européens. Mais malgré les sollicitations, il reste fidèle au club de son enfance, devenant même capitaine à seulement 19 ans.
Le talent de Torres était tel qu’un départ semblait inévitable. Après plusieurs étés à repousser les avances des plus grands clubs, il finit par céder en 2007 et rejoint Liverpool contre 20 millions de livres. Le lien entre Torres et les Reds s’était déjà dessiné bien avant son transfert, notamment à travers un brassard qu’il portait à Madrid, floqué du mythique « You’ll Never Walk Alone ».
Dès ses premiers pas sur la pelouse d’Anfield, Torres justifie l’investissement de Liverpool. Pour son premier match à domicile, il inscrit un but splendide contre Chelsea, lançant ainsi une histoire d’amour avec les supporters. Son entente avec Steven Gerrard devient rapidement l’une des plus redoutables d’Angleterre. Rapide, puissant et doté d’une finition clinique, il enchaîne les buts avec une aisance déconcertante.
Dès sa première saison, il inscrit 24 buts en Premier League, battant le record du meilleur débutant étranger en Angleterre détenu jusque-là par Ruud van Nistelrooy. Son influence est immédiate : il est le premier joueur de Liverpool à atteindre la barre des 20 buts en championnat depuis Robbie Fowler en 1995/96. Son talent éclabousse également la scène européenne, où il s’illustre notamment face à l’Inter Milan et Arsenal en Ligue des champions.
Alors au sommet de son art, Torres aborde l’Euro 2008 avec l’Espagne en pleine confiance. La Roja, longtemps perçue comme une équipe talentueuse mais incapable de triompher, change le cours de l’histoire sous l’impulsion d’une génération dorée. Torres en est l’un des artisans principaux.
En finale contre l’Allemagne, il inscrit l’un des buts les plus marquants de sa carrière. À la réception d’une passe millimétrée de Xavi, il devance Philipp Lahm et ajuste Jens Lehmann d’un subtil piqué. Grâce à cette réalisation, l’Espagne met fin à 44 ans d’attente et décroche son premier grand titre depuis 1964. Ce but symbolise le début d’une domination sans partage, qui mènera la Roja à soulever la Coupe du monde en 2010 et un deuxième Euro en 2012.
🏆 #OTD at EURO 2008…
— UEFA EURO 2024 (@UEFAEURO) June 29, 2020
🇪🇸 Fernando Torres's first-half strike earned Spain a first EURO crown in 44 years!
🤩 @SeFutbol | @Torres pic.twitter.com/0Fp3u4oETd
Si Torres continue d’enchaîner les performances de haut niveau après son sacre continental, son corps commence à lui jouer des tours. Les blessures musculaires s’accumulent, et bien que toujours redoutable devant le but, il perd peu à peu la vivacité qui faisait sa force.
La saison 2008/09 est pourtant l’une des plus mémorables de sa carrière. Associé à Gerrard dans un duo destructeur, il brille lors de victoires marquantes, notamment contre Manchester United (4-1) et le Real Madrid (4-0) en Ligue des champions. Contre Chelsea, il inscrit un doublé retentissant en fin de match, confirmant son statut de bourreau des Blues.
Malgré ses exploits, Liverpool échoue de peu dans la course au titre et, au fil des saisons, l’équipe s’affaiblit. Les départs de Xabi Alonso et Javier Mascherano laissent des traces, et Torres finit par perdre patience.
En janvier 2011, l’impensable se produit : Torres demande à quitter Liverpool et rejoint Chelsea pour un montant record de 50 millions de livres. Pourtant, son passage chez les Blues ne sera jamais à la hauteur des attentes.
Il lui faut 903 minutes pour marquer son premier but sous ses nouvelles couleurs, et malgré quelques éclairs – notamment un but crucial contre Barcelone en demi-finale de la Ligue des champions – il ne retrouvera jamais son niveau d’antan. Chelsea remporte la Ligue des champions et la FA Cup en 2012, puis la Ligue Europa en 2013, mais Torres reste une ombre de lui-même.
Lui-même le reconnaîtra plus tard : « Je jouais bien, mais pas chaque week-end. Et dans un grand club, si tu ne performes pas chaque week-end, ce n’est pas suffisant. »
Après un prêt décevant à l’AC Milan, Torres retrouve son club de toujours, l’Atlético Madrid. Même s’il n’est plus le jeune prodige d’antan, il joue un rôle précieux et ajoute une Ligue Europa à son palmarès en 2018, avant de terminer sa carrière au Japon.
Son dernier défi se joue loin de l’Europe, dans le championnat nippon, une destination symbolique pour lui, inspiré dans son enfance par Captain Tsubasa.
Fernando Torres restera l’un des attaquants les plus fascinants de sa génération. Son ascension fulgurante, son style explosif et ses performances de haut vol ont marqué l’histoire du football.
Si son déclin fut aussi rapide que son émergence, les souvenirs de son prime restent impérissables. De Madrid à Liverpool, d’Anfield à Vienne, il a fait vibrer des millions de supporters et laissé une empreinte indélébile dans le football moderne. El Niño a grandi, mais son héritage, lui, demeure intact.
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