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Arsenal 2022/23 : un canon armé de patience

Maîtriser presque complètement un début de saison : voilà bien une chose à laquelle Arsenal n’a plus été habitué depuis une poignée d’années. Pourtant fiers adeptes du traditionnel meltdown post-première journée, les Gunners semblent aujourd’hui réussir à imposer des standards tactiques et techniques qui confirment les espoirs placés en Mikel Arteta. Et si, comme annoncé depuis moults années, c’était enfin la saison d’Arsenal? Retour sur un mercato et un début de saison porteurs d’espoir.

L’Arsenal de Mikel Arteta

Afin de comprendre pourquoi le début de saison d’Arsenal semble aussi abouti, il est forcément nécessaire de le contextualiser. Tout comme l’arrivée de Klopp à Liverpool ou celle de Guardiola à City, celle d’Arteta à Arsenal ne s’est pas faite sans embûches. Au contraire, disposant d’un effectif bien inférieur à ceux de ses pairs susmentionnés, Arteta a dû apprendre à composer avec des profils qui se sont imposés à lui. Bien que manquant évidemment d’expérience managériale à ses débuts, les fondations du projet Arteta ont vraiment pu se bâtir pendant le mercato 2021, avec l’arrivée de joueurs comme Ben White, Aaron Ramsdale, Takehiro Tomiyasu ou encore Martin Odegaard. Ayant réussi à rajeunir et à rendre compétitif un effectif jusque-là en fin de cycle, la saison 2021-2022 a finalement marqué un moment charnière dans le passage de Mikel Arteta au club.

Malgré une cinquième place synonyme de non-qualification en Ligue des Champions, les fans de l’Emirates ont enfin pu retrouver un sentiment perdu depuis fort longtemps : à savoir celui de la fierté de voir une équipe flamboyante, jeune et portée vers l’avant, capable par moments de rivaliser avec la crème du championnat. Outre les résultats sportifs, c’est également la légitimité de Mikel Arteta qui a été renforcée auprès des supporters, de plus en plus enclins à croire au fameux “process” vendu depuis tant d’années. Et alors que se finissait encore il n’y a pas si peu de temps l’édition 2020-2021 de la Premier League, Arsenal n’avait pas d’autre choix que de se donner les moyens de ses ambitions. 

2021 : les débuts d’une ambition

Comme évoqué précédemment, le mercato 2021 d’Arsenal a marqué un premier tournant dans le choix des profils qui ont été ciblés par Mikel Arteta, notamment de par la volonté de rajeunir et d’augmenter le capital technique de son effectif. Si le début de saison d’Arsenal fut pour le moins chaotique après une défaite à l’extérieur face à Brentford en ouverture du championnat, et deux roustes respectivement infligées par Manchester City puis Chelsea, les Gunners ont su renverser la tendance et ainsi redonner de la fierté aux habitués de l’Emirates. Au-delà des simples résultats, c’est dans le contenu proposé par ce nouvel Arsenal que la fierté des supporters a pu prendre sa source. Notamment par le biais d’une saison ponctuée de superbes performances collectives dans lesquelles Arsenal a affiché un niveau de maîtrise et de contrôle rarement atteints au cours des dernières années.

En figure de proue, la prestation des Gunners lors de la réception de Manchester City le 1er janvier 2022. Avec le 11 de départ titulaire, Arsenal finit par s’incliner 2 buts à 1 grâce à deux buts inscrits par Riyad Mahrez et Rodri en toute fin de match. Et pourtant : alors à 11 contre 11, l’équipe titulaire de Mikel Arteta réalise une prestation de très haute volée, aussi bien sur le plan tactique que dans la réalisation technique. En plus du pressing excellemment bien rodé et d’un jeu sans ballon très appliqué réduisant les opportunités pour Manchester City, c’est avec ballon qu’Arsenal se montre le plus impressionnant, affichant une maîtrise presque parfaite qui sera concrétisée par un but de Bukayo Saka à la la 31ème minute après une belle action collective. Rares sont les équipes arrivant à obtenir un résultat face à Manchester City ; encore plus rares le sont celles qui arrivent à les dominer dans le jeu sur une mi-temps grâce au jeu de position.

Mais presque comme un symbole, la deuxième mi-temps est à l’image de la campagne 2021-2022 des Gunners. Alors toujours dominateurs, les hommes de Mikel Arteta sont réduits à 10 suite à deux cartons jaunes obtenus par Gabriel. Bien que vaillants défensivement, la donne change : Riyad Mahrez puis Rodri parviendront à renverser la vapeur et à donner la victoire à Manchester City. Mais outre le résultat, ce sont les 45 premières minutes que les supporters finiront par retenir : une nouvelle fois cette saison, le contenu proposé est source de fierté, et signe que les Gunners semblent enfin être sur le bon chemin.

Sur le bon chemin, certes, mais un chemin semé d’embûches. Pourtant bien lancés dans la course au top 4, Arsenal va connaître plusieurs coups d’arrêt, et est en proie aux limites attendues. Alexandre Lacazette peine à performer sur le front de l’attaque, tandis que différentes blessures (Partey, Tomiyasu, Tierney…) éloignent Arsenal de son meilleur niveau. Avec une profondeur de banc très légère couplée à un effectif très jeune et manquant d’expérience, Arsenal finira par céder le top 4 à un Tottenham aux individualités flamboyantes en fin de saison. Mais si les Gunners n’entendront pas l’hymne de la Ligue des Champions au sein de l’Emirates pour la saison 2022-2023, les améliorations sont nettes.

Arsenal 2023 : all or nothing

Le mercato 2021 avait été marqué par une politique sportive très bien définie : à savoir le recrutement de jeunes joueurs capables d’assumer techniquement les ambitions de jeu affichées par Mikel Arteta. Pour l’édition 2022, Arsenal décide de continuer avec cette politique. Alors que le mercato arrive, Arsenal doit continuer à se renforcer en reprenant les bases déjà posées la saison dernière. Première arrivée : celle de William Saliba, en retour de prêt après une saison pleine du côté de l’Olympique de Marseille. Très vite s’esquissent les lignes du premier chantier primordial pour Arsenal : la pointe de l’attaque. Alors qu’Alexandre Lacazette quitte le Nord de Londres pour un retour à l’Olympique Lyonnais, les Gunners doivent recruter un 9 compatible avec le jeu de position pratiqué par Arteta, et aux qualités de buteur largement supérieures à ceux qui ont pu tenir ce rôle dans un passé récent. C’est sur Gabriel Jesus que se jettera le dévolu de Mikel Arteta – un joueur évidemment Arsenal-compatible, et rodé aux caractéristiques du jeu de position. Pour continuer à se renforcer, Arsenal recrute un autre désormais ex-citizen en la personne de Zinchenko, capable à la fois d’évoluer en tant que milieu ou en tant qu’arrière gauche. Fabio Vieira, arrivé en provenance de Porto, complètera les arrivées pour ce qui en est de l’équipe première.

Sur le papier et sur le terrain, Saliba, Gabriel Jesus et Zinchenko (sans compter Fabio Vieira qui n’a pas encore eu l’occasion de pleinement s’exprimer) font passer un nouveau cap à Arsenal. Fin du 4231 et du double pivot Xhaka-Partey qui a souvent été la base du système de Mikel Arteta : ce dernier peut enfin mettre en place son système, qui a toujours été son système préférentiel, à savoir un 433. Tactiquement, on retrouve deux latéraux avec une position intérieure – Ben White, décalé sur la droite suite à l’excellent début de saison de William Saliba qui est devenu en l’espace de quelques journées le chouchou de l’Emirates, et Zinchenko à gauche, tout du moins jusqu’à sa première blessure. Thomas Partey, remplacé par Mohamed El Neny puis Sambi Lokonga pour les matchs face à Fulham puis Aston Villa après avoir lui aussi contracté une nouvelle blessure, agit comme seul 6 devant la défense. Au-dessus de lui, Martin Odegaard est le relai intérieur à droite, tandis que Granit Xhaka est le relai intérieur gauche. Sur les côtés, Martinelli et Saka assument la largeur, alors que Gabriel Jesus agit comme point de fixation plutôt libre devant. Le 433 avec les latéraux intérieurs permet ainsi à Arsenal de couvrir toute la largeur, et de continuer à implémenter le jeu de position tel que voulu par Arteta.

Un 4-3-3 déjà utilisé pendant la pré-saison

Les additions de Saliba, Zinchenko et Jesus, des joueurs aux qualités techniques exceptionnelles, permettent à Arsenal de franchir un nouveau cap en termes de maîtrise et de contrôle des matchs. Avec un pressing toujours très bien organisé, Arsenal maîtrise aussi bien les attaques placées en acculant l’adversaire dans ses 30 mètres, que les phases explosives en transition. Le symbole incontestable de ce renouveau tactique : Granit Xhaka. Autrefois conspué et aligné dans un double pivot plus bas sur le terrain, le milieu de terrain Suisse occupe aujourd’hui un poste de relai intérieur gauche qui le voit évoluer beaucoup plus haut, et assumer une part plus grande dans le jeu offensif de son équipe. Avec cette nouvelle maîtrise, permise par les additions du mercato, Arsenal réalise un début de saison en fanfare : 6 victoires sur 7 possibles, avec en prime des renversements après avoir été menés ou rejoints au score, une chose qui a grandement fait défaut à Arsenal les saisons passées.

La victoire maîtrisée d’Arsenal en déplacement à Bournemouth

Chasser les vieux fantômes

Et pourtant, aussi prometteur puisse être le début de saison d’Arsenal, très vite les vieux démons ont commencé à pointer le bout de leurs nez. Alors que les Gunners réalisent un début de saison parfait jusqu’à la défaite à Old Trafford contre le Manchester United version Ten Hag, Arsenal enregistre plusieurs blessures, notamment à un poste clé du milieu de terrain : celui de numéro 6. Ce sont respectivement Thomas Partey et Mohamed El Neny qui se blessent, mettant en lumière un obstacle qui pourrait entraver les ambitions d’Arsenal cette saison : la profondeur de banc. En effet, si la plupart des postes sont doublés chez les Gunners, plusieurs questions subsistent en matière de profondeur de banc, notamment sur les ailes et au milieu de terrain. Longtemps lié à des noms comme Youri Tielemans ou Douglas Luiz (rumeur apparue le dernier jour de mercato), Arsenal n’a finalement pas daigné recruté de numéro 6 ou de numéro 8 capable de compenser une éventuelle blessure de Granit Xhaka ou de Thomas Partey, comptant sur la polyvalence de profils comme celui de Zinchenko.

De même sur l’aile droite : en attendant l’intégration complète de Fabio Vieira, fantastique pour sa première titularisation face à Brentford, qui devrait occuper plusieurs postes (relai intérieur droit à la place d’Odegaard ou ailier droit), les Gunners ne sont pas allés chercher un remplaçant numérique à Nicolas Pepe, parti en prêt du côté de Nice. Des choix forts, mais qui pourraient bien avoir de lourdes conséquences, au sein d’une saison historique avec une Coupe du Monde en novembre, et un calendrier plus chargé que jamais. Et encore plus depuis le décès de Queen Elizabeth II, et la salve de nouveaux matchs à programmer. 

Malgré la défaite à Old Trafford face à Manchester United très froid de réalisme, Arsenal réalise un début de saison très prometteur. Les hommes de Mikel Arteta sont certainement une des équipes à suivre cette saison, tant par la qualité du football fourni que par les résultats obtenus jusqu’à maintenant. Le déplacement à Brentford durant la dernière journée jouée avant la trêve témoigne de cette tendance : un 3-0 maîtrisé de bout en bout, qui contraste fortement avec la performance qu’avaient livré les Gunners en ouverture du championnat l’année dernière. Mais dans une Premier League plus compétitive que jamais, la marge de manœuvre est très mince. C’est à Arsenal de désormais prouver désormais qu’il s’agit d’une équipe digne de la Ligue des Champions, compétition à laquelle le club de Londres n’a pas participé depuis 2016. 

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L’auteur

Quentinschlz

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